Les artistes et la téléprésence


 

Dans la sphère artistique, la téléprésence s'inscrit dans la continuité théorique, conceptuelle et pratique d'une partie de l'art de la communication. Citons, pour exemples, Le bras de fer transatlantique de Doug Back réalisé en 1985 entre Paris et le Canada ; Le robinet téléphonique de Fred Forest en 1992 à la Cité des Sciences et de l'Industrie de la Villette à Paris ou Telematic Sculpture en 1995 de Richard Kriesche dans le cadre de la Biennale de Venise.

Les oeuvres de téléprésence apparaissent et se développent au cours des années 1990. De plus en plus, l'instrument de télécommunication utilisé est Internet mais beaucoup -et non des moindres- reposent sur des lignes de téléphone RNIS.

 

Les oeuvres de téléprésence via Internet

Eduardo Kac

Après avoir créé (en 89/90) ses premières oeuvres de téléprésence via le réseau téléphonique commuté (voir plus bas), Kac, en 1996 propose plusieurs projets via Internet (notamment par CUseeme).

RARA Avis, dans le cadre des jeux olympiques d'Atlanta.

Teleporting an Unknown State (Siggraph, Nouvelle-Orléans)

Uirapuru, The Webot Travels Around The World in 80 Nanoseconds, Going from Turkey to Peru and Back (Otso Gallery, Espoo, Finlande).

Ces oeuvres sont documentées sur le site web de l'artiste

 

Ken Goldberg

Toutes les réalisations de Ken Golberg s'effectuent par l'intermédiaire du Web.

The Mercury Project, sorte d'énigme/chasse au trésor, 1994.

Telegarden, le premier télé-jardin de l'histoire, 1995

Shadow Server a commencé à délivrer des ombres aux internautes en 1997

 

John Canny & Ken Goldberg

Legal Tender 1996,

expérience sur Internet d'authentification d'un billet de banque (dollar)

 

John Canny & Eric Paulos

Telembodiement, 1997

Sous ce titre générique sont développé divers projets de télérobotique, notamment avec les PRoP (Personal ROving Presence) et les Blimps, structures gonflables, qui permettent d'explorer un espace. Ces instruments sont interfacés à Internet et s'inscrivent dans une tendance de plus en plus importante d'hybridation des espaces physiques et du cyberespace.

 

Masaki Fujihata

Light on the Net

C'est une sculpture lumineuse, dans le hall d'un immeuble de bureaux de la Préfecture de Gifu. L'aspect de la sculpture est modifiable via Internet.

 

Nina Sobell & Emily Hartzell

VirtuAlice

Dans une galerie se trouve une "chaise" motorisée conduite par un visiteur. Une caméra, montée sur la chaise est contrôlée à distance par les internautes qui découvrent ainsi la galerie et leur "chauffeur", sans avoir la possibilité de diriger l'engin.

Soulignons que c'est, à notre connaissance, la seule oeuvre de téléprésence réalisée par des femmes.

 

Les oeuvres de téléprésence par réseau téléphonique commuté ou par ligne RNIS

 

Eduardo Kac

Ornitorrinco

Créé en 1989, Ornintorrinco est un télérobot autonome et sans fil qui est mû à distance par l'intermédiaire du clavier du téléphone. Le "retour d'images" est assuré par un vidéophone. Le public perçoit l'environnement du télérobot à l'échelle de celui-ci et non à une échelle "humaine".

Eduardo Kac, en collaboration avec Ed Bennett, réalise, sous ce nom, plusieurs projets dont Ornitorrinco on the Moon en 1992 (entre Graz et Chicago), Ornitorrinco in Eden en 94 (Seattle, Chicago, Lexington), Ornintorrinco in the Sahara en 96 (Saint-Petersbourg, Chicago).

 

Paul Sermon

Telematic Dreaming, 1991

Ce dispositif est constitué de deux lits, dans deux endroits différents. L'image des participants dans un lieu est projetée sur le lit de l'autre lieu. La perception tactile du corps/image, du corps téléprésent est particulièrement vive dans cette oeuvre, exemple d'une téléprésence "désincarnée" (c'est-à-dire sans corps de substitution).

 

Rafael Lozano-Hemmer

The Trace, 1995

Pour cette installation, un espace tri-dimensionel identique est défini dans deux lieux différents, reliés par une ligne RNIS. Les participants sont munis d'un capteur qui indique leur position par des icônes projetées au plafond des deux lieux, à l'endroit qu'ils occupent dans leur espace physique ; par les lumières qui suivent leur parcours ; par des indications sonores mesurant la distance entre chaque participant (quel que soit l'endroit où ils sont) et par des indications statistiques sur un écran. Chacun expérimente donc un espace identique (celui de l'installation) dans des lieux différents et une présence dialogique de soi et des autres.

 

Oeuvre de télécommunication, de téléopération, de téléprésence : il est quelquefois difficile d'opérer des distinctions strictes au moment où l'on constate une hybridation croissante de l'espace physique et du cyberespace, un développement, une complexification et une intrication des systèmes technologiques.


Référence: http://cyberworkers.com/Leonardo/OLATS/reperes/visite/telepresence.shtml